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Libération

L'Asie terre d'influence

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Wong Kar-wai, Hou Hsiao-hsien, Weerasethakul, Tsai Ming-liang... autant de cinéastes exigeants et sensibles nourris au maître Antonioni.
publié le 22 septembre 2004 à 2h14

La scène n'est pas la plus citée de Profession : reporter. Pourtant, si l'on veut comprendre ce qui est en train de se passer autour de l'oeuvre d'Antonioni en termes de transmission, d'héritage, c'est au souvenir de cette séquence qu'il faut revenir : celle où le chef d'une tribu centrafricaine, exaspéré par les questions de Jack Nicholson s'empare de la caméra et décide de mener l'entretien de son point de vue. Pour qu'il n'y ait plus enquête à sens unique mais réversibilité. Pour que question photos d'identité, Nord et Sud soient quittes. Lorsque Antonioni tourne cette scène, qui est comme le renversement de toute son oeuvre, nous sommes en 1974. Il a 62 ans et paraît encore en photo, sous des oripeaux d'aventurier fringant toute chemise ouverte, sosie grisonnant de Nicholson. La maladie attendra encore dix ans (une attaque en 1985 l'a frappé d'aphasie). Mais en retournant sa caméra pour qu'elle restitue désormais le point de vue de l'autre, il laisse entendre qu'il est arrivé au terme de son rêve d'exil, d'une quête qui aura duré dix années sous forme de voyage ininterrompu. Qu'il est prêt à passer, non la main, ni l'arme à gauche, mais le relais.

Deux portées. A l'heure où débute à la Cinémathèque française un cycle Antonioni, on s'apercevra que, des grands modernes, il est celui qui aura eu le plus d'enfants. On lui connaît au moins deux portées. La première était occidentale et, pour beaucoup, décevante, vide de sens, emmenée par Wim Wenders : on y dis