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Libération
Critique

Vienne de violence

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«Struggle», premier film pamphlétaire et décapant de l'Autrichienne Ruth Mader.
publié le 13 octobre 2004 à 2h33

Alors qu'Elfriede Jelinek savoure, silencieuse et solitaire, un prix Nobel de littérature qu'elle a immédiatement lancé à travers la gueule de son pays natal, voici qu'arrive sur nos écrans l'un des purs produits de cette culture si typiquement autrichienne de l'autodénigrement et de la sourde violence. Un court film d'une heure et quart, signé par une frêle et jolie cinéaste de 30 ans, et pourtant l'un des pamphlets les plus virulents contre ce qui tourne trop rond du côté de Vienne. La forme est, le plus souvent, absolument neutre : images frontales, et souvent banales, du quotidien ; couleurs, matières et sentiments froids de la vie ordinaire ; sons et bruits de la consommation sans histoire. Mais, comme dans Lust de Jelinek, cette glaciation peut aussi servir sans heurts de vecteur à l'obscène pornographique, et comme dans les Exclus, tous les personnages peuvent être «normalement» conduits au meurtre le plus sauvage.

Vertu jouissive. Ruth Mader, pour son premier film (présenté en 2003 dans la sélection Un certain regard à Cannes), a voulu «cette forme simple» et «ces gestes désespérés» comme s'il y avait «le feu sous la glace». Struggle a la vertu jouissive d'incorporer la violence de façon quasi mutique : les plans ingèrent une brutalité latente, qu'ils finissent par rendre avec l'impassibilité, mais la rigueur objective, d'une mécanique soudain détraquée. Les deux histoires, qui se croisent à peu près au milieu du film dans un club échangiste de Vienne, portent cette p