Menu
Libération
Interview

«Une réponse à vingt ans d'humiliation»

Article réservé aux abonnés
publié le 10 novembre 2004 à 2h57

La cinquantaine chevelue et sereine, Eugène Green revient sur son troisième long métrage, autobiographique, polémique, manifeste de son art cinématographique si singulier.

Mes seventies. «Le Pont des Arts se situe dans une temporalité étrange. C'est un scénario écrit en 1997, après Toutes les nuits, et le temps décrit correspond à la fin des années 70, un moment où je tentais de faire accepter ma façon de faire du théâtre, cherchant le sens original des textes baroques du XVIIe siècle. Ce n'était pas facile. Le contexte polémique du Pont des Arts vient de là : il était difficile de faire comprendre au milieu culturel le sens de ce retour aux origines du baroque. Mais c'était aussi enthousiasmant : ces retrouvailles avec le texte ou la musique baroques étaient pleines d'effervescence, d'enthousiasme. La séquence de la répétition, quand Sarah chante le Lamento de Monteverdi, veut donner une idée de l'émotion qu'on pouvait ressentir alors. J'ai vu cette exaltation, mais aussi ces polémiques, ces humiliations. Il y avait à cette époque quelque chose de pur et de rude que le film tente de transcrire.

Le destin d'une chanteuse humiliée. Un scénario me vient toujours comme une sorte d'éclair, d'illumination. Là, il y avait trois éléments. D'abord Monteverdi. J'ai une passion pour la musique baroque, surtout les musiciens vénitiens du XVIIe. Le Lamento della ninfa était au coeur du film. Il a été interprété et enregistré pour moi avant le tournage, tandis que Natacha Régnier travailla