Imaginons le début d'une histoire : un metteur en scène fuit son pays, le Chili, et débarque en France en février 1974. Trente ans passent, durant lesquels le cinéaste enchaîne un nombre vertigineux de films, dont beaucoup scintillent comme de véritables joyaux baroques, héritiers du roman picaresque ou des labyrinthes proustiens. Le cinéaste, c'est Raoul Ruiz on l'aura reconnu. Qui, depuis cet exil, n'a cessé de tourner un peu partout sur le globe : en France, au Portugal, au Pays-Bas, sur des îles, des bateaux, en chambre, en rond. Mais plus jamais au Chili, où il n'est retourné qu'une fois, vers Noël 1982, écrivant depuis là-bas une courte vidéolettre pour la fameuse émission poste restante, Cinéma cinémas.
Dias de Campo est donc son premier véritable film chilien depuis Palomita Blanca, en 1973. C'est un film immédiatement à part dans la filmographie récente de R.R. : autoproduit sans l'aide du fidèle Branco, filmé en espagnol et dépossédé de la brochette de stars internationales joyeusement égarées (Huppert, Deneuve, Casta...) avec laquelle routinait un peu, ces derniers temps, la prolifique production du faussaire de génie.
Autoportrait. Film du retour en catimini, ces «journées en campagne» se présentent comme une transposition de certaines nouvelles de Federico Gana. A l'écran, c'est une autre paire de manches : une suite de dialogues délirants entre un homme âgé (Don Federico, poète imaginiste et écrivain imaginaire) et celui (nettement plus fringant, encore que for