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Libération

Déferlante camescopique

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publié le 5 janvier 2005 à 23h25

Quiconque fait profession un tant soit peu sincère de regarder les images ne peut chasser de son horizon celles qui, depuis le 26 décembre, remplissent les écrans. Pas tant les images filmées par les télés mondiales depuis que s'est abattu le tsunami mais celles qui, filmées par des caméscopes personnels au moment de son déferlement, nous arrivent depuis dans le désordre de circonstances catastrophiques. Des images prises par des touristes occidentaux, dans l'écrasante majorité des cas, mais parfois issues de familles locales, comme celles où l'on a vu l'océan engloutir les bas étages d'une maison où se tenait une cérémonie de fiançailles indonésiennes.

Ces images accostent jusqu'à nous avec des décalages que l'on s'explique facilement : n'étant pas professionnelles, elles accompagnent le touriste dans son circuit de sinistré, de rapatrié, parfois de veuf. Certaines sont parvenues néanmoins très tôt. Notamment de Thaïlande, où l'on a entendu une touriste française, au balcon de sa chambre d'hôtel, filmer la mer qui lui faisait face en commentant pour un tiers, hors champ : «Oh ! regarde, la vague là-bas, comme elle est grosse ! C'est dingue, on dirait un raz de marée !» Le ton est celui d'une métaphore exagérée, pas d'un affolement réaliste, parce que cette jeune femme, comme tous ceux qui vaquent sur la plage à ses pieds, ne peut se figurer ce que rien ne signale. Le calme est saisissant, il fait beau, les palmiers sont superbes, aucune secousse du très lointain tremblement