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Libération
Critique

Requiem pour l'Afghanistan

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«Terre et cendres», ode flamboyante d'Atiq Rahimi, exilé en France depuis vingt ans.
publié le 5 janvier 2005 à 23h25

Le premier film de fiction d'Atiq Rahimi est empreint d'une majesté qui rend justice à un pays magnifique, l'Afghanistan, peuplé d'habitants prudes et vaillants, ordonné par des rites d'une élégante rigueur, mais où l'on ne doit pas rigoler tous les jours. Après vingt-cinq ans de guerres continues, il n'est guère étonnant de voir arriver ce film hanté par les souffrances des combats et les fantômes des disparus. La splendeur formelle pourrait surprendre : elle n'est pourtant pas une esthétisation de la guerre, mais le signe des retrouvailles sentimentales, d'une sensualité topographique, d'un homme longtemps tenu éloigné d'un pays aux racines si profondes.

Atiq Rahimi est un exilé, ayant vécu près de la moitié de son existence en France, dans un état de manque d'Afghanistan. Le retour de l'enfant prodigue, pourvu des moyens d'une production occidentale et d'un parrainage aussi encombrant que luxueux (BHL), ne pouvait passer que par cette captation flamboyante des paysages, des étoffes, des couleurs, cet enregistrement, tous sens en éveil, des apparences et des regards.

Rahimi avait déjà écrit le roman de ces retrouvailles doloristes, ce fut Terre et cendres (POL, 2000). Une langue précise, incarnée, pour dire les traces laissées par la guerre et ses ruines encore fumantes. Avec le film, il prolonge son expérience des images (plusieurs documentaires sur son pays), en reprenant le canevas d'un livre fable : un grand-père et son petit-fils à la recherche du père, qui travaille da