Quand le film commence, le couperet est déjà tombé. Deux ans après, Bruno (José Garcia), chimiste victime d'une délocalisation, est toujours chômeur. Sa femme (Karin Viard) fait des petits jobs et il ne sait plus comment payer les traites de leur maison. Acculé, il décide d'éliminer le titulaire d'un poste qu'il vise, ainsi que les postulants éventuels une petite demi-douzaine.
Il ne les tue pas par jalousie (il ne les connaît pas). Ni par goût (il n'a rien d'un sadique). Ni par animosité. Ses ennemis, les vrais coupeurs de tête du système, il les connaît. Mais, dans la galaxie de la mondialisation, les actionnaires sont inatteignables. Alors, il tue ses alter ego parce que, précisément, eux et lui sont interchangeables, et qu'il doit jouer sa peau contre la leur pour sauver son train de vie et son image sociale.
Il tue, donc. Seul. Avec effroi, maladresse, opiniâtreté et stoïcisme. Mobilisant, dans le fond, les mêmes ressorts et les mêmes «vertus» que le héros de western acharné à défendre sa ferme et sa famille à coups de carabine contre les Indiens spoliés de leurs terres. On n'est plus dans la prairie pourtant, mais dans une Europe du Nord «paisible» et transfrontalière : le thriller de Costa-Gavras promène le spectateur dans un monde uniformisé de pavillons et d'intérieurs cosy, au confort beige, sournoisement vrillé par une violence létale. Celle du chômage et de l'individualisme.
Forcé de resserrer le roman implacable de Donald Westlake dont il s'est inspiré, Costa-Gav