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Libération
Critique

L'essai transformé

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A Pantin, le festival Côté Court célèbre l'essai filmé, ce mutant entre fiction et documentaire. En vingt programmes regroupant 73 films.
publié le 6 avril 2005 à 1h33

On pourrait essayer : se mettre dans la peau d'un documentaliste, d'un archiviste. Ce qu'il redoute le plus, au cinéma, ce sont les essais, objet d'un casse-tête rhétorique : appartiennent-ils à la fiction ou au documentaire ? Les deux à la fois. C'est la bonne réponse. Mais c'est une réponse qui n'avance pas le documentaliste. Il n'a de choix qu'entre deux cases à cocher sur la fiche d'identité du film, avant qu'il n'intègre la base générale de données. Or, les «essais filmés» sont à la fois des fictions avalées et des documentaires tissés sur le mode subjectif. Dans l'excellente Encyclopédie du court métrage français, parue cette année, dirigée par Jacques Kermabon (de la revue Bref) et Jacky Evrard (fondateur du festival Côté Court à Pantin), à l'entrée «Essai», on lit que «le vagabondage de la pensée du réalisateur, sa recherche d'une connivence avec le spectateur, l'usage de matériaux divers qui ont fonction de témoignage [...] peuvent entrer dans la composition d'un essai. Ce n'est pas tant sa facture que sa démarche ou son intention qui permet d'avancer qu'un film est ou non un essai cinématographique» (1).

En déséquilibre

On en conclura que l'essai est une vue de l'esprit, assumant sa subjectivité jusqu'au mensonge (revoyez les Photos d'Alix de Jean Eustache : quand Alix-Cléo décrit une photographie, c'est peu à peu une autre image que le cinéaste invite à venir occuper l'écran). Et que l'essai est torsion par nature. Où il faut se rendre à l'évidence de cette définiti