Beaubourg lance aujourd'hui l'intégrale-événe-ment Fassbinder, soit quarante-trois longs métrages (films et téléfilms) réalisés en treize ans. Cette exploration du monde de R. W. F. comprend en outre des documentaires sur son oeuvre, des adaptations de ses pièces et une exposition d'archives. L'actualité du cinéaste allemand, mort d'overdose en 1982, est encore amplifiée par la ressortie en salle de huit de ses films et par l'édition en DVD des huit opus distribués à l'automne dernier avec de riches bonus (lire encadré). Cette mise au jour d'une filmographie gigantesque, peu connue à l'exception de quelques titres, ne pouvait se priver d'un travail d'exégèse à la hauteur.
Une légende. La traduction du gros livre du Néerlandais Thomas Elsaesser, professeur au département médias et culture de l'université d'Amsterdam (1), auteur de nombreux autres ouvrages (sur Metropolis ou le cinéma américain contemporain), remplit cette fonction herméneutique en 500 pages bien tassées. Cette somme, publiée en 1996 sous le titre Fassbinder's Germany : History, Identity, Subject, pourrait décourager le néophyte parce qu'Elsaesser est du genre à conceptualiser dans tous les sens et pas toujours avec le souci de la pédagogie chevillé au ventre. C'est un peu la méthode hardcore à la Adorno, mais il y a pire influence dans la vie.
Son point de départ est simple : l'oeuvre de R. W. F. a été occultée par sa vie. Les amis biographes, plus ou moins bien intentionnés, ont alimenté la légende du potentat