Sur une affiche, ils sont trois, regard sombre de demi-sels disposés au méfait. Sur l'autre, il est seul, pas net non plus, puisque la blancheur de sa chemise ne fait que mieux ressortir le sang qui macule son avant-bras. Voilà deux films sombres, âpres et tendus, aussi urbains dans un sens qu'ils ne le sont pas dans l'autre. Sortis à un mois d'intervalle, ils n'ont pas la même envergure, mais on leur prête également une filiation plus ou moins fondée avec le Mean Streets de Scorsese. Les Mauvais Joueurs, de Frédéric Balekdjian, et De battre mon coeur s'est arrêté, de Jacques Audiard, possèdent en tout cas un lien de parenté irréfutable: Linh Dan Pham, trait d'union féminin, gracile et obstiné, qui parvient à s'incruster dans les deux univers masculins.
Orient-Occident. Côté Balekdjian, elle incarne la compagne intégrée de Pascal Elbé, tiraillée entre son boulot dans un fast-food asiatique, les conneries de son jeune frère et une vie sentimentale où affleure la désillusion. Primo-arrivante chez Audiard, c'est elle la professeure de piano chinoise qui perfectionne Romain Duris sans parler un mot de français, tout comme elle explose et l'engueule en VO (scène impeccable) quand celui-ci regimbe.
Dans le civil, Linh Dan Pham est polyglotte (français-vietnamien-anglais) et globe-trotter. Origine asiatique, passeport français, «sensibilité internationale». Trente années de la vie d'une femme, qui débute à Saigon (qu'elle quitte à 1 an, en 1975), arpente la banlieue parisienne (Bagne