Danger, blague : Cavalier est très à cheval sur ses principes. Si on peut se permettre ce genre limite, c'est qu'Alain Cavalier, dans son Filmeur, n'est pas avare de jeux d'images comme on parle de jeux de mots. Plus exactement, ce qui capture et ravit, comme un prince enlevant sa princesse, c'est qu'il y a du jeu entre ses images et qu'elles semblent souvent vivre leur vie, battre la chamade, nous affoler, inventer leur logique et, partant, leur progression, entre tête à queue et coq-à-l'âne.
C'est pourtant le contraire du n'importe quoi. Le déni, en tout cas, qu'il suffirait d'avoir une petite caméra pour devenir cinéaste. Et la preuve, encore plus, qu'il ne suffit pas d'avoir une vie privée pour qu'elle mérite de devenir publique, au nom de cette épouvantable idéologie de l'insignifiance signifiante.
Ecchymoses. Carnet de notes, le Filmeur est une production super où les moyens sont fauchés mais les blés qui poussent d'une grande beauté. Journal de bord, mais lequel ? Celui de Cavalier en personne, qui se montre en pied, sans cape et surtout en visage dans le miroir dès lors qu'une aile de son nez est attaquée par un cancer de la peau. En très gros plan, il ne s'épargne ni les ecchymoses postopératoires, ni les fils de la suture. Jusqu'à en plaisanter comme une magnifique leçon de savoir-vivre. Profil gauche, docteur Jekyll, profil droit, mister Hyde. Hollywood pourrait bien déverser des milliards de dollars, il n'arrivera jamais à la cheville d'un effet aussi spécial.
Et la