Un film peut avoir 35 ans d'âge et une saison d'avance. Le must de notre été 2005 a été tourné à l'automne 1970, comme en témoignent les tonalités ocre-beige de ses feuillages. C'est un film défilant sous nos yeux selon sa propre vitesse suicidaire et suivant sa propre voie, droit dans le mur, en bon carburateur flingué. Avec un tel programme, ça va sans dire, Two-Lane Blacktop (Macadam à deux voies) n'a pas, à sa sortie américaine en 1971, cassé la baraque. Le lancement avait été choisi un 4 juillet, jour de fête nationale, soit, pour le studio Universal qui le produisait, un enterrement first class.
Ils honnissaient ce film. Comme ils haïssaient son réalisateur, Monte Hellman, blanc-bec adoubé par Godard et citant Rivette comme influence majeure. Pourtant, de cycle en cycle, la légende Two-Lane Blacktop a couru.
Pas une personne qui, une fois montée dedans, n'ait oublié cette virée en terre américaine. Demandez à Stevenin, Akerman, Kramer, Kaurismaki, Gallo, Wenders, Jarmusch, Van Sant... Tous enfoncés un jour ou l'autre dans son sillage.
Le sillage d'«Easy Rider». Two-Lane Blacktop est le premier film que Monte Hellman réalisa pour une major, avec un budget serré de 900 000 dollars. Ce sera aussi le dernier. Le projet, deux types taiseux parcourant en voiture divers Etats d'Amérique, embarquant à leur bord une petite hippie et gagnant leur croûte en participant à des courses de bagnoles illégales, est de ceux qui se sont engouffrés dans la brèche ouverte par le succès d'