«Ce type a du génie», a dit Ingmar Bergman de Peter Watkins en sortant d'une projection d'Edvard Munch. En revoyant ce Munch après trente années de purgatoire, l'été dernier au festival de La Rochelle, puis au mois de février en salles, cette sentence bergmanienne tomba sous le sens. Il y a effectivement du génie dans cette manière anticonformiste de raconter les jeunes années du peintre norvégien, aux prises avec les conventions puritaines de son temps.
Watkins, dans ce film-somme de 1973, revisite les techniques documentaires et narratives qui lui ont permis, depuis ses débuts, dix ans auparavant, d'inventer une forme nouvelle de cinéma. Edvard Munch prend corps, acteur jouant ses paroles, ses gestes, ses amours, ses voyages, et en même temps il s'adresse directement à la caméra. Ses proches, ses maîtresses, lui-même, commentent leurs actions et liens avec le grand homme. Mélange subtil, le film est tout entier dévolu à l'enregistrement délirant du mouvement même de la création. Mais l'intérêt principal de la rétrospective parisienne, est de montrer ses deux premières oeuvres, quand se met en place le sys-tème Watkins, sa vision du monde.
Amour de la parole. Né en 1935, il étudie le théâtre à la Royal Academy of Dramatic Arts, formation dont il gardera un amour du jeu et de la parole dite, voire proférée. Puis travaille comme assistant sur des courts métrages et des documentaires.
Dès la fin des années 50, il réalise ses premiers films amateurs. Notamment The Forgotten Faces,