On dit que la tête des auteurs d'attentats-suicides reste souvent intacte. Arrachée du tronc par la violence de l'explosion, elle retombe parfois à plusieurs dizaines de mètres, rappelant l'insoutenable part d'humanité du kamikaze dont le corps n'est plus qu'un engin de mort. Une tête avec un visage, une bouche, des yeux, des soucis, un sourire, un homme donc, ou une femme, plus rarement. C'est ce que raconte Paradise Now, l'homme d'avant. Avant l'attentat-suicide, avant la nécessaire déshumanisation du kamikaze opérée par ses victimes et ceux dont le métier est de le stopper.
Saïd et Khaled sont amis d'enfance, à la vie à la mort comme on dit. Comme leur «vie, ici, est une prison à perpétuité», ils ont décidé de mourir ensemble. Enfants de réfugiés tous les deux, chômeurs, leurs seuls loisirs consistent à grimper sur les collines qui dominent Naplouse, et fumer, rêvasser devant un thé en contemplant les couleurs du couchant reflétées par leurs yeux. Depuis le début de l'Intifada, leur quotidien n'est plus fait que de bouclages, d'assassinats ciblés, d'incursions militaires, de bombardements et d'humiliations aux check-points. Travailler en Israël, même pour un salaire de misère, est devenu un rêve chimérique.
L'injustice, la misère, l'oppression et l'occupation ne suffisent pourtant pas à transformer systématiquement un individu en candidat au «martyre». Mais Hany Abu-Assad, réalisateur et scénariste de Paradise Now, a bien potassé son sujet. Comme l'a remarqué le psychiatre