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Libération
Critique

Civeyrac, lueur d'automne

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Plans longs, image léchée, «A travers la forêt» magnifie le manque amoureux.
publié le 12 octobre 2005 à 4h03

Une fille diaphane, tellement douce qu'à l'image on dirait de la soie, s'approche de la fenêtre de la chambre et lève les yeux au ciel. A son amant sous les draps, encore perdu dans un monde blanc, elle demande où s'en vont les nuages. Il n'y a pas eu, depuis longtemps, de début de film aussi atmosphérique, une façon à ce point amoureuse de poser les choses dans leur essence : un garçon que l'on n'aperçoit pas et une fille que l'on ne quitte pas des yeux. Le garçon, Renaud, va disparaître dans un interstice du plan. On ne le reverra plus. Le temps, aussitôt, vient de se couvrir. Il y a des garçons comme ça, dont l'existence ne supporte pas l'arrivée des nuages, et dont la mort entraîne dans le ciel comme un bouleversement.

La fille s'appelle Armelle, elle a deux soeurs (Roxane et Bérénice) qui sont comme des émanations d'elle-même. Quand elles s'élancent toutes les trois dans des séances spirites, on se croirait dans ce tableau de Khnopff que l'on peut voir au musée des Beaux-Arts de Bruxelles, Memories : sept femmes dans un parc, toutes au profil identique, toutes absorbées par la lumière, la brume des terres. Ce film les rejoint parce qu'il réinvente des femmes climatiques. Jean-Paul Civeyrac dit ne pas connaître ce tableau. Vendredi, dans un bureau parisien non loin de la place de la République, il avouait préférer Chardin et racontait être encore sous le choc d'un Veermer vu il y a une semaine à New York. Le goût, néanmoins, du symbolisme, des chairs fin de siècle, des cl