Il y a quatre ans, la mort a donné un caractère définitif aux Vacances prolongées de Johan van der Keuken, son dernier film, programmatiquement inachevé pour cause de cancer. Il y a une vingtaine d'années, le cinéaste filmait, dans un autre état de vacance, la mer des Wadden à sa manière méticuleuse et nonchalante. Vacuité d'abord de paysages étalés jusqu'à boucher l'horizon, vide de l'esprit pour mieux accueillir les lieux non communs de la pensée.
Métamorphose. La Jungle plate, jusqu'ici inédit, est une métaphore qui désigne la Waddenzee ou mer des terres humides, monotone zone côtière en bordure des Pays-Bas, d'Allemagne et du Danemark. Ce qui, à l'oeil nu de l'estivant assis dans son transat, ressemble fort à un désert des Tartares («Il n'y a plus que quelques lapins apprivoisés»), se métamorphose sous l'objectif de la caméra en une jungle mi-terrestre mi-aquatique peuplée de quantité d'espèces végétales, animales et humaines. Surgissent alors, dans le calme de cadrages tranquilles, de petites bestioles (carrelets, vers de terre,...) et de grandes causes (manifestation contre la centrale nucléaire).
Qu'il s'agisse du calfatage d'un chalutier, du repas des cormorans, de la récolte du lombric, du discours d'un syndicaliste ou du rythme des marées, les séquences sont traitées avec une constante équanimité. Il n'y a pas de combats mineurs ni d'images neutres. Son credo, van der Keuken aimait l'exprimer sous de multiples variantes ; celle-ci n'est pas la moins éclairante : «Il