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Libération
Interview

Le cinéma des perspectives immatérielles

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Les films d'Asie, ou l'art de l'anti-architecture, dixit Antoine Coppola, universitaire.
publié le 16 novembre 2005 à 4h35

Alors que paraît une somme sur l'architecture au cinéma, la Ville au cinéma (encyclopédie), le festival Image de la ville d'Aix-en-Provence faisait, la semaine passée, l'inventaire des liens entre la pierre et l'écran (1). Antoine Coppola, enseignant chercheur à l'université de Provence et spécialiste du cinéma asiatique (2), y démontrait que celui-ci s'envisage comme un «art de l'antiarchitecture». Un commentaire qui inscrit le cinéma de Hou (et son lien aussi bien à Taipei qu'à Tokyo) dans cette perspective.

Par la ritualisation. «Le cinéma en Asie travaille sur le temps, la lumière et la couleur, sur des notions immatérielles qui en principe s'opposent à l'urbain envisagé comme autant de formes stables organisant des cloisonnements. Les films d'Ozu ou de Mizoguchi sont une mise en scène des jeux de regards qui créent une architecture virtuelle, ouvrent des espaces ne respectant plus la fixité. Tout comme l'architecture traditionnelle asiatique organise des passages et se construit autour du vide. Les liens avec la spiritualité asiatique, du bouddhisme au syncrétisme religieux, fondée sur la notion de sunyata (un «vide» qui n'est pas du rien), sont évidents, notamment dans les maisons de thé. Le maître de thé Rikyu disait que chaque fois qu'il en construisait une, il ouvrait des vides. La société asiatique est ritualiste : la vie y est rythmée par des salutations qui prennent des heures. Les espaces architecturaux sont conçus pour ces rituels : le face à face dans les burea