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Libération

«Filmer, c'est attraper une sensation».

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publié le 14 décembre 2005 à 4h58

Le garçon est grand, pâle et conforme à sa réputation : beau. Un peu Iggy Pop, un zeste Guillaume Depardieu et beaucoup Joe Dallesandro période Warhol. Mais Dallesandro était moyen de taille, et il avait 20 ans. Sharunas Bartas en a quarante. Et ces cinq dernières années, il les a passées à monter la production de Seven Invisible Men, son sixième film, le septième si on compte un invisible documentaire. Cette énergie ne lui est pas nouvelle, il se bat depuis 1991. Ses débuts correspondent à ce moment d'effondrement économique lorsque l'ex-URSS a arrêté de financer les productions lituaniennes. Bartas surgit au même moment, avec un désir de cinéma intimiste, athée, aérolithe, façonné à cet endroit-là de la terre, aux côtés de ceux qu'il aime, à commencer par sa muse des débuts, Katerina Golubeva.

«Il a fallu s'organiser seul. Monter un studio, dans un chalet à la lisière de Vilnius. Depuis 1991, beaucoup de temps et d'énergie y ont été investis, pour moi mais aussi pour les autres cinéastes de la région : monter et tenir ce studio, trouver des tables de montage, des financements. Les années sans tourner sont des années de bureau.»

En fugue loin de ce chalet, Seven Invisible Men est filmé en Crimée. Pourquoi la Crimée ? «Pourquoi pas.» Quand les choses apparaissent évidentes à Bartas, il prend un air d'enfant découragé, et vous sourit avec toute l'impuissance du monde. «La beauté de la nature y est extravagante, surtout dans les steppes. Et il y vit beaucoup de Tatars. Ces gens