Il y a peu d'aventures semblables à celle-là. Diagonale, sur le papier, est une maison de production, née en 1976 et qui, depuis dix ans, ne donne pas de nouvelles d'elle. Mais le papier est le papier, quand Diagonale fut une aventure de vie autant qu'une élégance d'écran. Alors quoi ? Une boîte de prod ? Le mot marche mal ici - trop de vulgarité mécanique. Une compagnie ? Elle fut affaire de compagnons. Une coopérative ? Ceux de Diagonale ont puisé leur force dans la coopération, l'entraide, l'échange, le partage des tâches. Un style ? Etson fondateur, Paul Vecchiali, de répéter l'axiome : «L'économie, c'est le style.» C'est ici aussi une morale, une esthétique, une dialectique, un point d'honneur.
Une seule loi. Historiquement l'affaire remonte au tout début des années 60, où au Studio Parnasse, rue Chaplain se croisent Jean Eustache, Paul Vecchiali, Jean-Claude Biette, Jean-Claude Guiguet, les cinéphiles. Le premier va tourner très vite ses premiers films. Il servira d'exemple, de frère spirituel au second (plus âgé, polytechnicien de formation), qui le produira parfois, ainsi qu'aux deux autres qui, dans l'ombre de la cinéphilie attentiste, retardent, à coup de textes critiques, le moment du saut dans le vide.
En 1976, alors qu'il monte le financement de son film la Machine, Vecchiali se met à rêver d'une structure libre où les cinéastes partageraient la même équipe technique, la même troupe d'acteurs, occuperaient tour à tour les postes de monteur, machino, acteur, entrer