Depuis la mort de Kubrick, Terrence Malick est seul à occuper la fonction du grand maître paranoïaque et reclus, jouant du silence des astres noirs, mégalomane et hautain. Dès son premier film en 1973, Badlands (la Balade sauvage), il entrait de plain-pied dans la légende à une époque où, il est vrai, la machine mythologique hollywoodienne s'emballait, peut-être pour la dernière fois, autour de ses nouveaux arrivants surexcités, les jeunes Cimino, Scorsese, Coppola ou Lucas.
La démiurgie de Malick, par comparaison à celle de ses collègues de la même génération (il est né en 1943) est pourtant relative. Sans raison apparente, Malick, après les Moissons du ciel en 1978, et alors que des ponts d'or lui sont offerts, se retire et ne tourne plus pendant vingt ans. Cette retraite a suscité les conjectures les plus folles de nombreux admirateurs et biographes mais elle reste encore largement inexpliquée. Il aurait voyagé, réfléchi, jeté par les fenêtres un million de dollars de la Paramount sur un projet racontant l'origine du monde.
Rapidité. Quand le cinéaste texan (Waco), ex-étudiant en philosophie (Harvard, Oxford), admirateur de Heidegger (qu'il traduira en anglais) réapparaît en 1999 avec The Thin Red Line (la Ligne rouge), sa maîtrise de la mise en scène n'est en rien entamée. Il refuse toujours d'accorder des entretiens, ne se laisse plus du tout photographier. «Quand un auteur ne montre pas son visage, il devient une manifestation locale de la fameuse réticence de Dieu à app