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Libération
Critique

L'Argentine dans une mauvaise passe.

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publié le 15 février 2006 à 20h20

Tapino (paraîtrait qu'il s'appelle Victor) erre dans les rues de Buenos Aires. Tapino est gentil. C'est l'ange de la passe. Son sourire éternel ne l'aide qu'à ça : passer de deal en deal, là un petit sachet de blanche, là une demi-heure d'amour tarifé dans un sauna pour mecs ou dans la voiture d'un vieux type puissant qui joue au protecteur, quand à côté coexiste une misère autrement moins glamour. Tapino est très beau, il a une bonne queue et un gros coeur (ça équilibre son allure, lui évite de pencher : il peut se tenir droit, son obsession). Il aide les vieilles personnes à monter dans le bus pour le cimetière. Quand on se décidera à créer un prix Michel Drucker, on pensera à lui, c'est promis.

Quand on lui montre trop d'amour, Tapino, qui n'est pas le dernier pour la défonce, se met à avoir des hallus paranoïaques : des images de mort, où les fantômes de son passé reviennent le vampiriser. Tapino flippe grave, alors. Et le film avec, qui fout un peu le camp dans tous les sens.

Quincaillerie. Qu'est-ce qui ne va pas dans Ronde de nuit, pourquoi a-t-on à ce point l'impression qu'Edgardo Cozarinsky ­ qui est un cinéaste intelligent et l'a prouvé plus souvent qu'à son tour (de la Guerre d'un seul homme à Boulevard du crépuscule) ­ n'a pas su trouver la mesure ? Disons que le problème du film, c'est l'Argentine. L'Argentine comme fantasme et comme réalité. Edgardo Cozarinsky, qui n'a plus tourné là depuis longtemps, n'a pas voulu choisir entre son appétit pour la réalité argent