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Libération

Marges de liberté à Berlin

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Chantal Akerman et l'Iranien Rafi Pitts interrogent l'appartenance à une société, un pays.
publié le 15 février 2006 à 20h20

Il y a deux ans, Chantal Akerman nous avouait qu'entre autres formes d'exercice oeuvre à venir, elle filmait tous les matins un plan depuis la fenêtre de son rez-de-chaussée parisien. Naïvement, on a cru que Là-Bas, le petit 80 minutes vidéo qu'elle présente au Forum, en marge de la compétition, était ce journal matinal. Or, Là-Bas est effectivement un journal tenu depuis sa fenêtre, mais celle de l'appartement en hauteur (on aperçoit la mer, au loin), à Tel-Aviv, qu'Akerman vient habiter quelques semaines (on présume, à l'image, que c'est l'été) pour se reposer d'un état de santé morale et physique pas très folichon.

Epaisse lumière. Un journal intime, un plan de cinéma, un voyage, ça sert à quoi ? Exactement à la même chose : à mettre ce que l'on voit en perspective, à se mettre soi-même en perspective, à faire le point. Ceux qui attendaient d'Akerman un discours sur Israël auront autre chose : le son d'Israël, son épaisse lumière, une présence de Tel-Aviv que l'immobilité de la caméra et la justesse immédiate des plans captent avec un sens straubien de l'évidence. En off, Chantal dit ce qui lui passe par la tête, décrit la gentillesse envahissante des gens qui lui téléphonent, gémit (un peu trop) sur sa santé et raconte sa famille, pourquoi celle-ci a préféré s'installer en Belgique plutôt que «là-bas» en Israël, donc en quoi là-bas ne sera jamais chez elle. Comme Akerman a choisi de s'exprimer en anglais et qu'elle imite fort bien, sans le savoir, l'accen