Le PDG se fait cravater à la sortie du bureau. Secoué comme un prunier, il est conduit directement à la prison de la Santé. Il s'apprêtait à passer un week-end de rêve avec sa maîtresse, il doit baisser son pantalon devant les flics et les matons. Embastillé, sans garde à vue, sans visite d'avocat ni même mise en examen : c'est l'image de la justice saisie par l'ivresse du pouvoir. Expéditive. Fantasmée. Heureusement fantasmée. Le lendemain, après avoir joué au chat et à la souris avec le PDG lors d'un simulacre d'interrogatoire, la juge donne le dossier à l'avocat et rentre tranquillement chez elle savourer son plaisir. Des patrons en prison, des juges qui prennent leur pied. C'est le souvenir qu'on gardera peut-être de l'actualité politique des années 90. Avec cette certitude que les vrais dépositaires du pouvoir fumeurs de cigares dans le film, un temps embarrassés, n'ont pas été détrônés.
Les vrais acteurs de l'affaire Elf ont plus qu'inspiré le scénario. Humeau, alias Le Floch-Prigent, est constamment tourmenté par son psoriasis. Du haut de sa tour, Sibaud, alias Philippe Jaffré, successeur du premier, tente de séduire et de manipuler la juge. Quant au sénateur à la voix rocailleuse, Descarts, alias Charles Pasqua, il surveille ses réseaux africains. On entrevoit Christine Deviers-Joncour servant un verre de vin à Roland Dumas. Mais l'ivresse est celle de Jeanne Charmant Killman, alias Eva Joly, dans le salon de thé de son cabinet d'instruction.
Admirée par son neveu, p