Bienvenue dans le monde froid : n'importe où que l'on se place, The Saddest Music in the World est un film givré. Tourné en 2002 à Winnipeg dans le grand Nord canadien alors que le monde entier s'échauffait autour d'une possible troisième guerre mondiale en pleine lumière du désert (on était en mars, et les USA attaquaient l'Irak), le film, d'un noir et blanc lustral, nimbé d'un halo noir qui en fait ressortir toute la blancheur neigeuse, semble tomber tout droit d'une planète lointaine : celle du cinéma muet. Premier paradoxe, donc, et pas des moindres : the Saddest Music in the World est un film musical (on a encore du mal à surnommer l'objet une comédie, à moins d'être bigleux au point de confondre Eraserhead avec la Vache et le prisonnier), dont le coeur secret est le silence. Un chant actionné par des vieux mange-disques mais engendrant des images regardées par des sourds. Rien de surprenant au fond, The Saddest... est un film de Guy Maddin.
Par -20 °C. Il existait autrefois un vieux machin avec Laurel et Hardy où Stan Laurel vivait dans une tranchée, bouffant des conserves en attendant la fin de la guerre. Personne n'avait jugé bon de l'avertir que le Premier Conflit mondial était terminé depuis quinze ans. Même chose pour Guy Maddin : son imaginaire circule quelque part entre le Nosferatu de Murneau et les expérimentations postmodernes des premiers David Lynch. Comment opère-t-il ? Maria de Medeiros, parfaite ici dans le rôle d'une néo-Louise Brooks nymphomane et amnés