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Libération
Interview

«Une portée universelle, sans visages»

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publié le 22 février 2006 à 20h25

Monika Borgmann et Lokman Slim sont deux des initiateurs du projet Massaker avec Hermann Theissen. Rencontre à Paris.

Monika Borgmann. Je suis allemande. Avant de vivre à Beyrouth, j'étais journaliste free lance au Caire. Je traite de sujets liés à la violence. Qu'est-ce qui se passe pour qu'un groupe de personnes bascule dans la violence collective ? A mes yeux, Massaker ne parle pas seulement de Sabra et Chatila mais est un exemple d'une question plus universelle. Quand quelqu'un tire, il tire hors contexte politique, culturel, religieux. Qu'est-ce que ça fait la première fois ? A partir de quand s'habitue-t-on ? Il y a des barrières dans l'humain. Le tueur les enfreint.

Lokman Slim. Je suis libanais, né à Beyrouth. Je me considère comme un citoyen qui a de la peine à ne pas pouvoir exercer tous ses droits. Je m'oppose à toute entrave de la liberté civile. En tout premier lieu, toute censure de la mémoire. Dans ce que je fais, que ce soit de l'édition, ce film, il y a un souci permanent de la chose publique. Qui ici se manifeste sous la forme d'un crime de guerre, un «événement historique». L'est-il d'ailleurs ? Après 1982, il y a eu d'autres massacres, mais il y a eu une banalisation de la violence qui fait qu'on on ne se souvient que de Sabra et Chatila. 5 000 morts ou disparus en quarante-trois heures. La spécificité de Sabra et Chatila existe. C'est un «point de capiton» comme disent les psychanalystes, dans les guerres libanaises.

Vous dites «les guerres» ?

L.S. Oui, syst