Quatre ans après son premier long métrage, Wesh wesh, couronné du prix Jean-Vigo, Rabah Ameur-Zaïmeche, le franc-tireur grandi à l'ombre des tours de la cité des Bosquets de Montfermeil, continue de s'inscrire avec une autorité incroyable dans les cercles concentriques toujours plus larges qui mènent de soi-même à la connaissance universelle. Prenant le cinéma à l'abordage, il revient avec Bled Number One, tourné en vidéo dans sa région natale à l'extrême nord-est de l'Algérie. Les deux films s'articulent autour d'un même personnage que le cinéaste-producteur interprète : Kamel, en sursis à sa sortie de prison, sous le coup de la loi de la double peine. Hier, il était un fantôme dans une banlieue parisienne qui n'avait pas encore flambé ; aujourd'hui, on le retrouve expulsé de France et revenant dans ce village entre les collines et la mer.
Puissance. Kamel n'est pas l'alter ego d'Ameur-Zaïmeche ni une pure fiction. C'est une figure intermédiaire et comme coupée en deux par le devenir. Toujours ici et ailleurs, présent-absent, culturellement hybride, héritier des catégories ancestrales de l'ascendance paysanne berbère, et contemporain des grands déracinements postcoloniaux, il est à la fois le parent et l'étranger, le guide et l'égaré. Son rapport aux événements s'en trouve profondément marqué, il en perdrait presque la parole, spectateur d'une activité quotidienne aux solidarités codées, où il a du mal à trouver sa place. En même temps, ces retrouvailles avec la terre algéri