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Libération
Critique

Un faible pour Belvaux

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publié le 25 mai 2006 à 21h20

Nous sommes tous d'accord : les injustices du monde s'aggravent chaque jour sous nos yeux. Ici, en Europe, en France ou en Belgique, c'est pareil : des pauvres toujours plus insupportablement pauvres, des travailleurs épuisés, sous-payés et qui vivent de surcroît sous la menace permanente (et presque garantie) qu'on leur retire bientôt leurs rudes emplois et maigres salaires, qu'on délocalise ces vieilles usines que les générations libérales laissent pourrir sur pied. Nous le savons, nous le voyons : trop de misère ici et de l'argent trop visible là. Ce face-à-face a déjà défoncé tous les plafonds de l'acceptable. Pourtant il s'amplifie, se perpétue. Alors, jusqu'où ? Que faut-il faire ? Sortir la kalachnikov ? La seringue ? Le Prozac ? Lucas Belvaux (lire le portrait page 24), lui, sort sa caméra. Et ça fait mal.

Dernier rempart. La Raison du plus faible dit tout dans son titre à la simplicité trompeuse. Cette raison s'oppose au droit du plus fort, auquel le cinéaste refuse de plier son film, son émouvante histoire et ses très beaux personnages. Dans les quartiers populaires de Liège, trois hommes placides veulent rendre service à un jeune père dans le besoin. Ils échafaudent un casse qui sera aussi une vengeance : braquer le coffre d'une usine sidérurgique où deux d'entre eux ont passé une vie d'exploités avant d'être mis au rencart anticipé.

Ce que filme Belvaux, c'est l'utopie réaliste et l'amitié vitale comme dernier rempart de la dignité humaine. Dans sa fable, les perso