Le Tigre est un hebdomadaire curieux de 24 pages sans publicité et paraissant le vendredi (1). Dans son numéro 9, sorti le jour de l'ouverture du Festival de Cannes, il titrait sur cette bonne question : «Le cinéma peut-il être français ?» Plusieurs constats peu patriotes, et présentant le mérite d'une certaine fraîcheur intègre dans leur style, étayaient un dossier qui portait en fait sur la crise du cinéma français : les comédies pas drôles qui cartonnent, la pieuvre Canal, la religion du box-office, la complaisance critique, etc.
Quinze jours plus tard, de retour d'un Festival dont tout le monde est à peu près d'accord pour dire qu'il fut globalement médiocre, on songe à la question que le Tigre posait, mais reformulée à la lumière de l'expérience cannoise : comment le cinéma français peut-il l'être et à quoi ressemble-t-il quand on le juxtapose à tous les autres ?
Etre français, pour notre cinéma, cela consiste de plus en plus à se triturer la francitude. Contrairement à une idée reçue, le jeune cinéma français réputé auteur n'est pas le plus nombriliste. Tout le cinéma mainstream français, et particulièrement celui de comédie, semble foncer tête baissée dans la soupière identitaire, narquoisement placée sous le signe du Gaulois Astérix, plus grosse recette locale à ce jour. Depuis ce triomphe, c'est un déferlement continu de variations franchouilles et protéiformes, dont le dernier exemple est Camping et son écrasant succès. D'ailleurs, sa tête d'affiche Franck Dubosc n'a