Menu
Libération
Critique

L'amène Arménie de Guédiguian

Article réservé aux abonnés
Fine incursion du Marseillais sur les terres de ses ancêtres.
publié le 28 juin 2006 à 21h36

Jusqu'à présent, l'Arménie avait le statut de clin d'oeil dans le cinéma de Robert Guédiguian, du moins dans ses douze premiers films : un dialogue, des notes de musique, un personnage secondaire, et le nom du cinéaste, évidemment, fils et petit-fils d'Arméniens de Marseille, mais Allemand par sa mère et surtout enfant de l'Estaque. L'Arménie comptait peu comme «identité» chez ce marxiste pour qui le monde se divise entre riches et pauvres, seul conflit méritant attention. Pourtant, depuis qu'il est devenu un cinéaste connu, Guédiguian n'a pas laissé sa part d'engagement pour la cause (notamment la reconnaissance par la France du génocide de 1915), et l'on sentait que de plus en plus, l'Arménie le travaillait de l'intérieur.

Imagerie. Aujourd'hui, ce pays en dedans, il part à sa rencontre au dehors, à Erevan, faisant voyager, depuis Marseille (où le film commence), les danses folkloriques et l'imagerie du mont Ararat, pour voir comment elles tiennent le coup dans la réalité d'un monde postcommuniste, corrompu, mais dont le bordel fleure bon les senteurs et les couleurs locales. La bonne idée du film est d'avoir piégé l'identité arménienne à front renversé. Les figures qui transportent cette arménité impossible sont Ariane Ascaride, fille d'émigrés italiens, et Marcel Bluwal, juif d'Europe centrale, qui jouent Anna, docteur des hôpitaux de Marseille, et son père Barsam, vieillard pas commode qui veut finir ses jours au pays, dans le village des montagnes arméniennes où il a ma