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Libération
Critique

«Baby Boy Frankie», les nerfs serrés

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Une histoire de flingueur pro rattrapé par ses blessures.
publié le 5 juillet 2006 à 21h51

Allen Baron est un type qui a voulu jouer au cinéma comme il l'entendait (avec nervosité et sarcasme), a perdu (du point de vue de l'industrie) et a passé les trente dernières années à se refaire à ses yeux en signant des épisodes pour des séries telles que la Croisière s'amuse, Drôles de dames, Shérif fais-moi peur ou la génialissime Ile fantastique. Il n'y a pas de sot métier, mais, à voir ce grand moment de série B années 60, c'est quand même dommage. Comme si Mickey Spilane, David Goodis ou John Fante s'étaient résignés à ne plus rédiger que l'horoscope ou les chiens écrasés. Blast of Silence (pourquoi l'a-t-on rebaptisé Baby Boy Frankie pour la sortie ici, mystère ?) a eu un prix à Locarno en 1961, mais n'a jamais été repéré en France. Aux Etats-Unis, sa férocité fauchée, sa démarche pessimiste détonnaient trop, si bien qu'on le montra discrètement en souhaitant très fort que les gens aient autre chose à faire plutôt que d'aller le voir.

Blast tient en 77 minutes serrées de partout, du budget à la mâchoire de son acteur-producteur-réalisateur, un blanc à faciès d'Italien dégageant une antipathie systématique, sans doute parce que son regard est orgueilleux et que sa frustration, son envie, sa haine, transpire à l'image. Mais c'est tout le génie du film que de se bâtir sur quelqu'un de moins romantique encore qu'un antihéros.

Frankie, c'est un dingue, parano à fond, monologuant comme si Joyce n'avait jamais écrit Ulysse. Un solitai