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Libération
Critique

Les feux de l'amour

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par Emily BARNETT
publié le 16 août 2006 à 22h57

Un cheval s'avance au trot sur une route de campagne, s'immobilise soudain, visiblement captivé par quelque forme maintenue dans le hors-champ, et qu'un mouvement de tête de l'animal consent à dévoiler : une jambe, d'abord, puis l'horizontalité gracieuse d'un corps évanoui. Sa jeune maîtresse, sans vie peut-être, après la chute qu'on devine. Une minute dans le chant amplifié des cigales, et le muet spectacle se trouble d'une voix : «Tu as mal ?», «tu as des fourmis dans les pieds ?», «tu sens quand je te touche l'épaule ?» L'adolescente s'éveille au contact des mains méthodiquement posées sur son corps. Aussitôt, regard et visage s'embrasent à la vue du pompier qui dispense les premiers soins et allume, sans le savoir, le premier feu de Ça brûle. Le sauvetage ouvre sur une cristallisation amoureuse à combustion lente, en plein coeur adolescent.

Physiologique. . Livrer un coeur aux flammes, c'est tout le projet du deuxième long-métrage de fiction de Claire Simon, réalisatrice habituellement affiliée au genre documentaire. Pour autant, il ne sera pas question de transports, de langage ou de rituels amoureux. Plus que métaphorique, la brûlure est physiologique. Au lendemain de la rencontre, Livia, à peine éveillée, vérifie sur son portable si le pompier, Jean Susini, a cherché à la joindre, dans un geste dont le caractère inédit s'étend peu à peu au reste du corps. Tel mouvement de tête, telle coloration de peau ou inflexion de voix affectent celui-ci d'une identit