Le Caire de notre correspondante
Les 112 députés égyptiens qui ont en vain réclamé à cor et à cri l'interdiction de l'Immeuble Yacoubian n'avaient peut-être pas tort en craignant que ce film ne démolisse l'image si soigneusement entretenue de l'Egypte. Oubliés les pyramides, les danseuses du ventre à bourrelets, l'egyptian lover à l'oeil humide, le comique facile et la cavalerie lourde, qui peuplent d'ordinaire le box-office égyptien. Le premier long métrage de Marwan Hamed, 28 ans, est non seulement le film le plus cher de l'histoire du cinéma égyptien, mais aussi une bombe à portée internationale qui vient briser tous les tabous du monde arabe : corruption politique, hypocrisie religieuse, homosexualité, islamisme, torture policière, tout y passe.
Play-boy. Depuis la sortie du film au Caire, au début de l'été, le débat fait rage entre ceux, ravis, qui n'en reviennent pas d'avoir pu voir un film arabe aussi audacieux, sans compromis et sans censure, et ceux, choqués, qui estiment que ce film nuit à l'image du pays. «C'est un scandale, les gens vont croire que l'Egypte ce n'est que ça», rage un professeur d'université au sortir d'une séance. Adaptation assez fidèle du best-seller d'Alaa el-Aswany, l'Immeuble Yacoubian conte la vie des habitants d'un immeuble autrefois cossu du centre-ville du Caire. Au rez-de-chaussée vivent le portier et son fils Taha, étudiant méritant. Dans les étages se croisent Zaki, un play-boy vieillissant, Hatem, journa