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Critique

Straub-Huillet, dernières «Rencontres»

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Alors que Danièle Huillet vient de mourir, «Ces rencontres avec eux» restera comme le dernier manifeste du couple de cinéastes marxistes, altièrement indépendants.
publié le 18 octobre 2006 à 23h43

Que s’est-il passé dans les derniers Straub, soit toute la décennie des adaptations de textes de l’écrivain Elio Vittorini (Sicilia !, Ouvriers, paysans et le Retour du fils prodigue-Humiliés) ? L’espace s’est progressivement rétréci. En adaptant Vittorini, et à travers lui son communisme, les Straub avaient fait peser les corps de leurs acteurs paysans de tout leur poids. Le monde semblait se résumer à un sous-bois élégiaque ­ autant dire un dernier refuge. S’il ressemble extérieurement aux films de cycle, Ces rencontres avec eux est pourtant adapté d’un autre grand Italien : Cesare Pavese. Ce sont cinq des vingt-sept Dialogues avec Leucó (écrits en 1947), livre dont les Straub avaient déjà tiré un anachronique De la nuée à la résistance à la fin des années 70, tout en toge mais joué dans la Rome contemporaine. Ces toges, ils y ont aujourd’hui renoncé. Quand ils adaptaient Kafka en 1985, les Straub réussissaient à le marxiser. Adaptant Pavese en 2006, ils continuent obstinément le communisme de Vittorini. Il filme donc les attaques que Pavese l’athée porte à la mythologie, donc à l’Italie, en la filmant de pied, ici et maintenant ­ comme on dit, à prendre et à laisser.

Ça tient du bon sens : Pavese s'intéresse aux dieux lorsque ceux-ci ont voulu devenir humains, descendre sur Terre et goûter aux saveurs de la mortalité. Des dieux à qui ne manquait que notre trop humaine «fragilité». Pour Danièle Huillet et Jean-Marie Straub, l