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Libération
Critique

«Lumières» noires

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Aki Kaurismäki plus bressonien et pessimiste que jamais.
publié le 25 octobre 2006 à 23h48

La lumière : froide. Les visages : serrés. Le récit : sec, cassant. La ville : moderne, angoissante. Mais qui a laissé la porte du réfrigérateur ouverte, bordel ? Les Lumières du faubourg referme une trilogie entamée avec Au loin s'en vont les nuages et l'Homme sans passé. Une trilogie de la lose, de la marge. Il restait un espoir dans les deux précédents. Alors, cet espoir-là, le dernier film, au sens terminal, se devait de le piétiner. Une heure vingt, c'est le temps qu'il faut pour solder l'amour, l'humain, la société. Si vous y croyez encore après ça, c'est que vous abritez en vous un samaritain.

Humiliations. Kaurismäki en est un, du reste. C'est ce qui fait qu'il ne ressemble pas à Chaplin (les Lumières de la ville, c'est évidemment une fausse piste : le génie de Chaplin est dans sa dureté), un peu plus à Ozu (même palette de couleurs, et presque le même trait) et de plus en plus à Bresson, celui de l'Argent, le dernier. Economie semblable, même mécanique qu'on laisse faire juste pour voir jusqu'où on peut aller dans la répétition des humiliations quand on a décidé de s'acharner, et tout miser ensuite sur le plan final. Et encore, en filigrane. Ne pas hurler trop fort que vous êtes un bon vieil optimiste. Noyez plutôt votre chagrin dans une vodka.

Cohérence. Alors, s'il faut répondre à la question s'il est bien le dernier Kaurismäki ? Disons qu'il force un peu sa nature de ténèbres, donc laisse sur la faim. Mais il est parfait là où il