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Libération

Rocha volcanique

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Sortie en copies neuves de sept films du Brésilien intenable, figure du Cinema Novo.
publié le 20 décembre 2006 à 0h34

D'après la légende, Glauber Rocha était un monstre, au sens dévastateur du terme, porté par une dimension de folie et de grotesque qui dépassait l'entendement. Sans nul doute, l'image d'Epinal du cinéaste déchirant la pellicule avec les dents à la table de montage est totalement imaginaire, un cliché que les cinéphiles ont aimé rêver : il se disait un ogre et les cinéastes ogres se comptent sur les doigts d'une main. Glauber Rocha, à ce jeu-là, avait quelques longueurs d'avance, seul Fassbinder pouvait rivaliser. Que les deux soient morts quasiment au même âge (42 ans pour Rocha, 38 pour RWF), et à dix mois d'écart, laisse songeur : il devait y avoir quelque chose dans l'air conditionné du début des années 80 qui les aura fait rompre. On meurt de fatigue, de désespoir, d'avoir poussé trop loin le bouchon, on meurt aussi quand on arrive à la fin d'un chemin, quand on a fait le tour de sa propre terreur.

Trajectoire. Rocha, c'est ce qui est presque inquiétant, ne laisse pas l'impression d'une oeuvre inachevée, mais au contraire d'une trajectoire ­ et le mot est voisin de «tragédie» ­ en trois temps. D'abord l'explosion du Cinema Novo, Nouvelle Vague brésilienne dont il est l'ambassadeur. En 1962, Barravento, son premier film, fait semblant d'être une oeuvre néoréaliste sur un village de pêcheurs, mais il en porte déjà l'aberration : le vent a rendu ivre la représentation. Puis, entre 1965 et 1970, viennent les chefs-d'oeuvre acclamés : le Dieu noir et le Diable blond<