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Libération
Critique

Eastwood passe à l'ennemi

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Pour «Lettres d'Iwo Jima», contrechamp de «Mémoires de nos pères», le cinéaste américain revit la bataille du point de vue des assiégés japonais. Un requiem élégiaque parmi les sommets de son oeuvre.
publié le 21 février 2007 à 6h13

A bientôt 77 ans, croulant sous les récompenses honorifiques, cumulant succès publics et dithyrambes de critiques qui voient en lui «le dernier grand cinéaste classique américain», Clint Eastwood peut désormais tout se permettre à Hollywood. Y compris, alors qu'il travaillait sur le scénario de Mémoires de nos pères consacré aux soldats américains de la bataille d'Iwo Jima (Libération du 25 octobre 2006), convaincre son producteur Steven Spielberg de tourner un deuxième film sur cet événement clé de la guerre du Pacifique, mais en adoptant le point de vue de l'«ennemi» japonais. Le projet est sans précédent dans l'histoire du cinéma mondial et d'autant plus fou que, tourné avec des inconnus, en japonais sous-titré et dans des tunnels éclairés a minima, Lettres d'Iwo Jima s'annonçait comme un seppuku commercial à 60 millions de dollars. Et pourtant... Les Japonais sont séduits par l'hommage du gaijin Eastwood à leurs propres morts (lire ci-contre), le public américain suit et les nominations aux oscars pleuvent (meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur scénario original...) pour ce requiem élégiaque qui s'impose comme l'un des sommets de l'oeuvre déjà considérable d'Eastwood.

Nausée. La beauté de Lettres d'Iwo Jima repose avant tout sur la simplicité de sa narration. Alors que Mémoires de nos pères s'épuisait à jouer sur tous les fronts (description de la bataille au coeur de l'action, décryptage de la réalité derriè