Et là qui fait quoi ? Des deux côtés de la barrière qui sépare les morts et les vivants, un film a transité. Un vidéaste vivant a monté, organisé et dialogué les photographies (au moins une par jour) prises durant 365 jours par un cinéaste (Jean-Daniel Pollet) qui se savait manquer de force pour pouvoir accompagner le projet jusqu'au bout de sa course. Le film, in fine, ressemble surtout à celui qui n'est plus là. Il en est le dernier portrait possible. Assis à la table de montage, Jean-Paul Fargier est devenu l'exécuteur testamentaire de Jean-Daniel Pollet : il en applique le programme. La situation est inhabituelle tout autant que la visée : interroger le concept de Deleuze d'image-temps par la force d'un film totalement photographique, un film immobile.
Contemplatif. L'immobilité, Pollet y était tenu depuis des années, depuis qu'un train l'avait renversé alors qu'il prenait des images. Ses derniers films (Dieu sait quoi, Ceux d'en face), filmés dans sa ferme du Vaucluse, portaient ouvertement en eux quelque chose de déjà mort. A ces films préposthumes succède donc deux ans et demi après la disparition de Pollet, ce film after death, encadré de noir, une sorte de beau catafalque contemplatif. Des images de fruits, de feuilles, de couleurs qui passent, des natures mortes : la Méditerranée n'est peut-être jamais apparue aussi glaciaire, saisie dans une sorte d'inertie polaire.
La «sérénité» que Pollet attend, résigné, a déjà rongé l'image, ce qui donne au