Menu
Libération
Critique

Von Trier, voilà le travail !

Article réservé aux abonnés
Avec «le Direktør», satire féroce du monde de l'entreprise, le Danois remet les pieds dans le plat avec un procédé de tournage automatique.
publié le 28 février 2007 à 6h21

Profitant d'une pause dans sa monumentale trilogie américaine (Washington devrait un jour succéder à Dogville et Manderlay), Lars von Trier revient au Danemark pour une comédie post-Idiots d'une férocité bienvenue, un projet lancé vite pour passer un peu de détergent acide là où ça fait mal, dans le social. Lars von Trier a beau répéter partout que le Direktør n'est qu'une petite comédie sans conséquence, il ne trompe personne : il y a ici à l'oeuvre, dans sa toute puissance satirique, une des charges politiques les plus féroces jamais envoyées à l'endroit du monde du travail, ce royaume infini de l'absurde et de la violence symbolique. Des preuves ?

Un patron sans scrupule engage un acteur pour jouer son rôle au sein de son entreprise. Il le fait parce qu'il est d'une lâcheté inimaginable lorsqu'il s'agit d'annoncer les mauvaises nouvelles (licenciements massifs, ce genre). Engager un autre pour faire semblant de vous diriger n'est pas commun, mais cela n'est possible qu'à partir du moment où les employés de l'usine eux-mêmes ne savent pas que vous en êtes le patron. Et justement, Ravn (car il s'appelle Ravn) n'est, à leurs yeux, qu'un bon cadre gentil, le nounours consciencieux qui joue le rôle de tampon entre les autres employés (qui le savent un des leurs) et ce grand patron, qu'ils n'ont jamais vu. Aucun ne soupçonne le gros barbu dans le bureau à droite de la machine à café d'être le big boss, le deus ex machina qui tire les ficelles.

B