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Libération
Critique

José Bénazéraf, le sexe façon sixties

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Le réalisateur cul(te) et le contexte cul(turel) de son cinéma sont au centre d'un livre inhabituel et érudit de Herbert Mathese.
publié le 25 avril 2007 à 7h25

Sous tous rapports, c'est un objet irréductiblement inhabituel que cette monographie. Son grand format beau livre n'est pas de ceux que l'on choisit, habituellement, pour gloser sur un pornographe. Pareil pour le papier, glacé jusqu'à coller aux doigts. Papier moite, grand luxe, jusqu'à l'inutilité.

Mais inhabituel, le Bénazéraf de Mathese l'est surtout dans le corps même du texte : à la base, sept entretiens, menés par l'auteur (qui soumet Bénazéraf à la question depuis les années 70) entre mars et juin 2002. Des interviews qui respectent fidèlement la scansion vénéneuse du parler bénazérafien.

Silicone. On déguste avec un mélange de fascination (c'est une vie, toutes les vies n'en sont pas) et de fatigue (la rage, maintenue sur tant de pages, jamais épuisée). Qu'il y ait là plus de points de suspension que dans toute l'oeuvre de Céline fournit une musique. Très colère, la musique. Mais ce n'est que le début, la matrice. Le projet a débordé Bénazéraf. Mathese sait tout sur une façon de filmer un peu disparue. Il sait tout sur Robert Lee Frost, sur Rapha Temporel et Poupée la Rose (des filles du Crazy), sur Maria Grazia Buccella et Gianna Maria Canale. C'est un livre où l'on apprend que Régine Rumen, la fille aux yeux de chat, se serait suicidée en octobre 1965 après avoir été l'une des premières victimes des opérations à la silicone. C'est un livre encerclé par son savoir maniaque. Les notes de bas de page finissent par dévorer le texte : ces informations ­ glanées d'