Depuis Xiao Wu, artisan pickpocket en 1997, Jia Zhang Ke s'est imposé comme le plus talentueux des cinéastes de la nouvelle génération chinoise. Né dans une ville de province, il a grandi dans les années 80, à une époque où enflaient des mouvements littéraires et philosophiques de contestation qui devaient aboutir aux manifestations de Tienanmen. Sa filmographie est une description de son pays comme le lieu d'une irréalité grandissante.
Que connaissiez-vous de la Chine du Sud ?
Pas grand-chose. Je suis originaire d'une province du Nord et le Sud était une région inconnue et lointaine pour moi. Avec l'équipe, nous avons pris un bateau pour remonter le fleuve jusqu'au Trois-Gorges et nous avons traversé des paysages de falaises, d'eau et de nuages. On était en pleine peinture ou poésie traditionnelles chinoises, une tranquillité et un calme absolus et, en arrivant à Fengjie, tous les éléments sensoriels de la modernité nous ont assaillis. La ville a été abandonnée par les planifications à partir de 1949 et la pauvreté y était encore plus forte que celle que j'avais connue partout ailleurs. Le supplice du dépeçage d'une ville vieille de plus de 2 000 ans me paraissait exemplaire de ce qui se passe en Chine : la destruction des traces du passé. Il fallait tourner vite parce que la réalité physique des lieux changeait si rapidement qu'on pouvait perdre un décor en quelques jours.
Pourquoi utiliser des éléments de science-fiction avec un ovni qui traverse le ciel, un immeuble