Pourquoi Claude Sautet a-il été aussi longtemps boudé par une partie de la critique ? En gros, par les Cahiers du cinéma et Libération, mais aussi par Jacques Lourcelles, l'auteur du plus savoureux des dictionnaires du cinéma made in France (1). Que penser de la qualification dépréciative qui faisait des Choses de la vie ou de Vincent, François, Paul et les autres... un simple portrait de la France pompidolienne, et de l'accusation récurrente portée contre Sautet de faire un cinéma bourgeois ou, pour reprendre Jacques Lourcelles, un cinéma en forme de «sociologie un peu fade» ? A revoir ces films et les autres, il y a de quoi alimenter une certaine perplexité.
Nouveaux canons. Le mieux est de revenir au début, à Classe tous risques (1960). C'est là que le malentendu commence. Ce film est dédaigné par la critique et ignoré par le public. Est-ce parce que nous sommes au début de la Nouvelle Vague et que Classe tous risques ne correspond pas aux nouveaux canons de la pertinence cinématographique ? C'est pourtant un polar sec, tragique et beau comme peu de films français. L'interprétation, dominée par Belmondo et Ventura, est remarquable. Rien n'y fera. Sautet lâche la réalisation. Ancien aide de camp de Jacques Becker, raccommodeur efficace des ratés d'autres réalisateurs, il est connu dans le milieu. Il commence une carrière de consultant, inspirateur de scénarios, qu'il interrompt en 1965 pour tourner l'Arme à gauche