Macclesfield, banlieue grisouille de Manchester, n'est pas Cannes, loin s'en faut. Rien n'est plus à l'opposé de cette désinvolture méridionale, ce grand tout nu tout bronzé, qu'un Ian Curtis toute mâchoire serrée, ses convulsions épileptiques, ses yeux grands comme deux maxi 45 tours, ce col de chemise boutonné jusqu'à la suffocation. Cette musique-là, cold wave, atterrissant in fine à Cannes, en ouverture de l'autre festival (la Quinzaine qui, ce faisant, s'offre un beau coup) fait de l'inimaginable une réalité : hé, ils viennent de faire un film sur Ian Curtis et le pire , c'est que ce film est bien. Evidemment, ça fait bizarre : l'idée que toute cette mythologie adolescences forgées par écoutes répétées ad nauseum d'Unknow Pleasures et autres Substances puisse dépasser en terme d'aura la surface de nos chambres calculées sur celle de nos mélancolies. L'intimité du chanteur de Joy Division et, par prolongement ado, la nôtre, rattrapée par le mainstream, est-ce une bonne nouvelle ?
Magie. Là oui, en l'occurrence. En partie parce qu'elle est postée par Anton Corbjin, qui n'a jamais été directement de la galaxie Factory (le label de Joy Division et de New Order) mais qui, dès ses premiers travaux, les pochettes pour Eyeless in Gaza ou Captain Beefheart, les clips pour Depeche Mode ou U2, avait su perpétuer une noirceur comparable. Encore fallait-il trouver le garçon d'une vingtaine d'années (Ian Curtis avait 24 ans lorsqu'il se s