La nuit appartient à ceux qui n'ont rien d'autre. Elle leur donne trop et jamais assez. Parfois, on y croise Norah Jones. Avant, il lui arrivait de chanter dans des bars du Texas. Si Billie Holiday ressuscitait pour l'inviter, elle préférerait l'écouter : «Concert better than dinner.» Aujourd'hui, Norah Jones chante loin des bars où Billie finissait. On l'écoute dans de grandes salles ou au fond d'un canapé, sur un coussin à air circulant entre jazz, folk, soul et blues, tout ça très souple, sensuel et sans danger. Elle a 28 ans, trois disques, une vingtaine de millions d'exemplaires vendus. Son dernier album, Not Too Late, est sorti cet hiver. Elle y évoque les soldats américains qui partent en guerre ; son premier appartement à New York, quand elle a débarqué du Texas où sa mère l'a élevée ; les rapports compliqués avec son père, le musicien indien Ravi Shankar, qu'elle a refusé de revoir jusqu'à 19 ans : «J'avais l'habitude de penser/Qu'un jour je me détendrais un peu/Te ressemblant un peu plus/ Puis j'ai réalisé à quel point c'était une pensée stupide/J'avais besoin de me tenir dans mes chaussures.» A Cannes, elle enlève les siennes et en met d'autres, plus souples, pour marcher, entre deux entretiens à l'abattage sur un plateau couvert et bâti sur plage à trois mètres de son partenaire Jude Law, plus attentif à ses interlocuteurs malgré un torticolis.
Elle est petite et aime l'odeur du chèvrefeuille. Son nez est légèrement épaté. Elle vient de découv