Après cent dix ans de loyaux services, on commence à s'apercevoir que le cinéma appartient au domaine de l'impardonnable : pire que la littérature (impudique par essence), loin devant la peinture ou la musique, il n'épargne pas ceux qui prennent le risque de s'exposer sur son écrin trop grand. Quand un premier film avance vers le spectateur en sifflant l'air, mille fois rejoué, de l'intimité inavouable et en portant pour titre Tout est pardonné, on peut craindre que la toute jeune cinéaste (26 ans !) qui le signe ne sache pas ce qu'elle fait. A la sortie, remué (pour longtemps) par un film qui ne se pardonne rien, on sait : Mia Hansen-Løve sait parfaitement où elle fout les pieds. Dans un endroit du cinéma où les vies se réécrivent en silence. Un endroit où la plus grande douceur a, in fine, la caresse du fil barbelé. Tout est pardonné pose l'absence répétée, le manquement à tous les devoirs, comme principe narratif : ils disent une vie. Celle d'un père fugueur (dope et autres dépendances amoureuses et extraconjugales), et celle d'une fille qui avance dans l'existence en encerclant ce manque.
Volutes. Elle ne le charge pas, n'en fait pas un drame : elle va en cours, elle va en boîte, elle lit les livres qu'on lui impose. Chaque jour, elle pousse autour de ce père absent à la façon d'un lierre. Un jour la fleur, à force de dessiner des volutes, finit par toucher le bois originel : le père et la fille se revoient. Il est encore trop tôt pour dire s'ils se