Le dernier dimanche de Cannes, une rumeur relativement fondée a couru toute la journée, donnant De l'autre côté palme d'or. Il ne s'est trouvé personne pour juger la chose déplacée. Même si Fatih Akin n'est finalement reparti qu'avec deux lots de consolation (prix du scénario et prix du jury oecuménique : coooool !), cela dit assez bien comment en deux films (la fiction Head-On, ours d'or à Berlin en 2004 et un documentaire musical, Crossing the Bridge) Fatih Akin, inconnu il y a encore quatre ans, s'est imposé en valeur confirmée du cinéma international. Ses films (il en est à son sixième) plaisent, car ils ont souvent pour eux une envie de dire avec fougue le monde dans lequel on vit, la circulation des corps, le clash des cultures. On peut lui reprocher un idéalisme qui parfois se noie dans une absence de nuance, voire un manque de perversité.
Akin croit encore éperdument au pouvoir éclairant du cinéma. Cela n'empêche pas ce jeune trentenaire, né en 1973 à Hambourg de parents turcs, de réussir à transmettre quelque chose de cet état du transitoire devenu permanent, panacée des jeunes gens d'aujourd'hui. Pour cela, il a appris depuis Head-On à transformer son énergie en une sorte de méthode : il empile les matériaux, les prend à pleines mains, les mélange et commence à en tirer un à un les fils. «J'écris la biographie de chaque personnage, en marge du scénario, sa trajectoire, ses goûts, la musique qu'il écoute. Il y a même une liste comprenan