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Libération
Critique

Le choeur au fusil

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publié le 21 novembre 2007 à 1h36

La France ? Elle a envie qu'on la prenne, croyait savoir Dominique de Villepin. Serge Bozon l'a prise de la plus curieuse façon, entre quatre yeux et en empruntant le registre d'une épopée intimiste : le vagabondage, en novembre 1917, d'une petite troupe de poilus sur la ligne de front. Une jeune femme travestie en soldat les suit. Elle veut retrouver son fiancé parti en guerre. Pour s'intégrer à la petite troupe, elle va forcer son consentement. Au début, on croit que c'est elle, l'intrigue. Mais progressivement, le mystère se transvase d'elle en eux : au fait, qui sont-ils, que font-ils et où vont-ils ?

Au terme de la France, on n'en saura finalement pas beaucoup plus sur la dizaine de personnages qui composent son cortège errant et à maints égards fantôme. De bocages en sous-bois, de rivières en tranchées, de granges en belle étoile, les hommes et la femme cachée partagent le sel de la Terre, mais la terre, alentour, est en sang. Leur nomadisme incessant, la frontière toujours repoussée vers laquelle ils tendent dessinent un territoire concret et imaginaire qui est le coeur même du film, son sujet titre.

Il n'y a pas, cependant, une idée particulière de la France à l'oeuvre dans la France. Il y en a mille, picorées dans l'immense réseau de signes, vaste polysémie infuse sous laquelle nous sommes culturellement conditionnés à identifier quelque chose de la France.

Ses paysages, certes. Sa langue, évidemment. Mais aussi ses types humains (l'instituteur, l'ouvrier