On dirait que Billy Ray a Washington dans la peau. Ses deux longs-métrages se passent dans des milieux bien différents : le premier dans celui de la presse, le second dans le monde de ce que Washington persiste à appeler «Intelligence», malgré les preuves du contraire régulièrement apportées par tous ses services secrets confondus. Ressentiment. Le titre français du premier, le Mystificateur, collerait assez bien au héros central de cet Agent double (Breach en VO). Car si le jeune assistant joué par Ryan Philippe en est le moteur, la vieille taupe après laquelle ils courent, lui et toute la CIA, n'a rien d'un personnage de Le Carré. Ou du moins des Le Carré grande époque. Toute la différence est inscrite, comme au burin, dans le faciès chafouin et torturé de Chris Cooper : un homme que n'animent ni l'idéologie, ni l'appât du gain, mais le ressentiment. Robert P. Hanssen, malgré son nom d'auteur de romans d'espionnage, est un rond-de-cuir - un fonctionnaire aigri, qui empile les vexations comme autant de corsets d'épines ou de silice pour mieux les brûler dans sa vengeance froide. Il y a aussi du religieux chez lui, du jésuite assassin, version born-again, comme on en trouve dans la garde rapprochée du moindre Bush. C'est un beau personnage de roman, sauf qu'il existe bel et bien : Hanssen, arrêté en janvier 2001, s'est révélé être l'espion le plus dommageable pour le gouvernement américain de toute l'histoire du FBI. Il a compromis des systèmes
Critique
Piège à taupe
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par Philippe Garnier
publié le 28 novembre 2007 à 1h43
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