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Libération
Critique

Le point final d'un écrivain poids plume

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publié le 9 janvier 2008 à 1h52

L'ascèse est difficile, hélas, et toujours guettée par le trop. Que ce soit le trop-plein - dans l'Ile de Pavel Lounguine, qui sort cette semaine - ou le trop vide, le blanc ostentatoire - comme dans cet Homme qui marche.L'instance de mort est encore moins compatible avec l'image qu'avec l'écrit.

On pourrait dire, muni d'un nez de clown triste : c'est l'histoire d'un type qui meurt place Saint-Germain-des-Prés. Elle est librement inspirée de celle du Russe Vladimir Slepian (1930-1998), qui publia un unique texte, dans la revue Minuit, en 1974, intitulé Fils de chien. On en entend des extraits dans le film. Ou alors : c'est un mec qui maigrit en rasant des murs. Un champion de jeûne kafkaïen ? Quelque chose comme ça. De fait, Viktor Atemian (c'est son nom dans le film) surgit de nulle part et ne marche que pour s'effacer, se dépouiller, ne garder vif en lui que l'écriture. C'est tellement réussi qu'on a, en sortant, l'impression d'avoir vu voler une feuille morte. L'Homme qui marche est aussi un homme muet. Il marche (c'est-à-dire : il ne «dysfonctionne» pas) parce qu'il a appris qu'il n'y a plus, au bout d'un temps, qu'à se taire. Face à quoi ? A la compromission, à la satisfaction.

Car Viktor a eu des amis. Ils servent ici de contrepoint. Il y a lui, qui ne réussit pas, qui n'a pas de réseau, qui ne peut pas compter sur son seul génie pour convaincre les éditeurs de sa vérité. Ils refusent tous ses autres textes. Et son copain Daniel, photographe médiocre