Il faut prendre au sérieux le titre de ce film : Histoires à ne pas dire. Dans l'Algérie d'aujourd'hui, où les préjugés régressifs renforcent les mensonges officiels, parler des liens noués par les Algériens avec des pieds-noirs ne se fait pas.
Né à Tlemcen en 1943, ayant refusé de quitter l'Algérie car il soutenait sa révolution, Jean-Pierre Lledo est, dès l'abord, un pied-noir de type particulier. Il a fait ses classes de cinéaste à Moscou, ses premiers films en Algérie, avant de s'exiler en France lorsque la menace islamiste s'est faite trop précise, en 1993. Puis il est retourné dans son pays une fois que le malheur s'est éloigné. On ne vit pas une histoire personnelle aussi agitée sans réfuter à un moment ou un autre les mensonges que le destin met sur votre route. Il a donc décidé de dire des vérités peu confortables sous la forme de quatre récits vrais et dérangeants et de portraits étonnants (1).
Larmes. Algérie, histoires à ne pas dire commence avec Aziz, un ingénieur agronome à l'air tranquille. Il raconte à Lledo sa jeunesse passée dans un hameau au-dessus de Skikda, autrefois Philippeville, en Kabylie. Il a du mal à retenir ses larmes quand il évoque le souvenir de sa famille massacrée par les soldats du colonel Aussaresses, ordonnateur des basses oeuvres de l'armée française. L'émotion n'est pas moins forte quand il raconte comment son voisin, un cultivateur français d'origine corse, l'a aidé à surmonter cette épreuve atroce et à continuer à vivre.