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Libération
Critique

Visa pour la marge

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publié le 16 avril 2008 à 3h07

Présenté à Venise en septembre 2006, Rome plutôt que vous (Roma wala n'touma) était accueilli par Marco Müller, directeur de la Mostra, en ces termes : «C'est un des meilleurs films maghrébins que j'ai vu ces dernières années, capable de faire vivre presque en prise directe le climat spirituel d'un pays marqué par des massacres, des razzias et des rébellions terroristes.»

Le premier long métrage de Tariq Teguia a mis six ans à se faire et il aura mis deux années encore avant d'atteindre les écrans français. Mais ce retard a aussi permis à la rumeur cinéphile d'enfler autour de cet astre tombé des décombres de l'Algérie moderne. Un astre dévoré par le vide qui semble aspirer les personnages, Kamel et Zina, garçon et fille d'Alger d'une vingtaine d'années, dans le gouffre dépressif d'un no future ni choisi ni scandé, subi avec un mélange d'ironie et d'amertume.

«A saisir : jeune pays, très peu servi», dit un carton intercalaire, reprenant une phrase trouvée par le cinéaste sur un mur de la ville. Le même rire sous cape traverse de part en part le corps engourdi de Rome., qui vaticine de faubourgs déglingués (La Madrague) en plages vacantes, entre l'ennui (le «j'sais pas quoi faire, y a rien à faire» de Pierrot le Fou, 1965, tube éternel) et la fièvre («le meilleur, c'est un sommeil bien ivre, sur la grève», hit rimbaldien inusable). Regarder les bateaux du port, tourner en rond en voiture à la recherche d'un ami sans adresse, se faire serrer par les flic